1 Rois 3,5.7-12
Psaume 118 (119)
Romains 8, 28-30
Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 13, 44-52
Qui ne connait pas le roi Salomon et son fameux jugement rendu aux deux femmes qui s’attribuaient chacune, la maternité d’un bébé? Un bref aperçu historique de la situation : chacune des deux femmes mit au monde un bébé, or l’un des bébés mourut asphyxié; les deux femmes se disputèrent alors le survivant. Et comme personne ne trouva de solution à ce différend, les deux femmes furent conduites devant le roi Salomon afin de régler l’affaire. Le roi décida donc de couper l’enfant en deux parties à l’aide d’une épée, et de donner une moitié du corps à chacune des prétendues mères : « Partagez l’enfant vivant en deux et donnez une moitié à la première et l’autre moitié à la seconde ». L’une des mères accepta la proposition, tandis que l’autre la rejeta énergiquement, préférant protéger la vie du bébé. Face à cette réaction, le roi Salomon reconnut donc en la deuxième, la véritable mère de l’enfant et ordonna qu’on lui remette le bébé. (1 Rois 3, 16-18). Cet épisode qui rendit Salomon célèbre en matière de sagesse se situe à la suite du texte de ce dimanche, qui met en évidence la grande prière de Salomon faite à Dieu : acquérir la Sagesse pour gouverner le peuple. Le texte de ce dimanche laisse présager un roi serein, en dehors de toute inquiétude, et pourtant…
…Salomon accède au trône, au prix des batailles fratricides : ses frères, concurrents au trône, sont sauvagement abattus, et une fois roi, Salomon se débarrasse de tous ceux qui lui font ombrage dans l’exercice de ses fonctions, comme quoi, les batailles fratricides pour le pouvoir, ne datent pas de notre époque. Sur le trône de Jérusalem, Salomon est vite rattrapé par les réalités du pouvoir ; fraichement couronné roi après le grand règne de son père David il se rend compte qu’être roi est bien plus qu’une affaire d’honneur et de gloire. L’accès au pouvoir peut nous faire pousser des ailes, mais la réalité de ce pouvoir peut être cruelle au point de nous faire sombrer dans une désillusion totale. C’est le cas de Salomon : le peuple pour lequel il s’est battu ne lui est pas acquis, visiblement ce peuple ne respecte pas le nouveau roi aux ambitions démesurées, et en plus ce n’est pas un peuple comme tous les autres peuples, c’est le peuple que Dieu lui-même « s’est choisi pour domaine », selon l’expression biblique. Bien malin donc celui qui compte gouverner ce genre de peuple sans l’Esprit de Dieu. Et c’est Dieu lui-même qui se tint devant Salomon en ces termes : « Demande ce que je dois te donner. » Qui n’aurait pas aimé être à la place de Salomon, entendre Dieu lui dire une telle chose ?
Ça aurait surement été l’occasion d’en découdre avec Dieu pour tous les malheurs qui nous accablent et dont il est l’unique responsable selon notre conception. Ça aurait aussi été l’occasion de régler tous nos comptes, en demandant le pouvoir absolu sur l’univers et même sur les autres. De tout cela, Salomon prit du recul. Cette proposition de Dieu lui inspira une réponse à la hauteur d’un roi d’Israël.
En effet, pris entre ses ambitions démesurées et les réalités du pouvoir politique, Salomon découvre la nécessité de la seule chose qui vaille la peine d’exister, celle qui peut lui permettre de construire le pont entre son statut de roi d’Israël et le Dieu d’Israël. Cette chose est celle sans laquelle son règne irait droit à l’hécatombe : « Ainsi donc, Seigneur, mon Dieu, c’est toi qui m’as fait roi, moi, ton serviteur, à la place de David, mon père : or, je suis un tout jeune homme, ne sachant comment se comporter, et me voilà au milieu du peuple que tu as élu ; c’est un peuple nombreux, si nombreux qu’on ne peut ni l’évaluer ni le compter. Donne à ton serviteur un cœur attentif pour qu’il sache gouverner ton peuple et discerner le bien et le mal.» La sagesse est le bien le plus précieux de la vie et Dieu seul détient les clefs de cette sagesse ; et puisque tout pouvoir vient de Dieu, Salomon se rend à l’évidence qu’aucun roi ne peut véritablement gouverner sans l’intelligence conférée par celui qui est à l’origine de tout pouvoir. La réponse de Salomon était déjà à elle seule, un signe de sagesse. Demander la sagesse pour mieux gouverner, est déjà un signe de sagesse en soi. Salomon pose les jalons de la responsabilité de tous les rois dont le rôle premier est l’épanouissement du peuple, mais il reconnait aussi de façon explicite que, de même que Dieu a élu son peuple, il choisit des hommes pour le gouverner, car de mémoire de fils d’Israël, Dieu n’est jamais venu siéger en personne sur le trône à Jérusalem. Il a toujours choisi des hommes qui sont ensuite investis par son onction.
La moralité de toute cette affaire est qu’en dehors de la sagesse, nous sombrons dans le manque de discernement qui est la source de toutes les confusions dans notre vie. Notre prétention à penser que nous sommes maitres de nos événements, nous pousse à prendre des décisions regrettables et irréversibles. En toute chose, il faut savoir raison garder, et en toute chose, il faut du discernement, même dans nos intentions de prières. La véritable sagesse se trouve dans le juste milieu entre nos ambitions et la réalité concrète de notre vie. Celui qui trouve ce juste milieu a trouvé la sagesse, et qui trouve la sagesse a trouvé un trésor qui mérite d’être gardé pour toujours. Tout l’évangile de ce dimanche se résume en cette moralité.
Pata KANGUE, CSSp
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Merci pour la parole de vie 🙏
Belle et sage homélie pour une époque où sagesse et discernement semblent avoir déserté notre monde.
Puissions-nous, comme Salomon retrouver le chemin de la prière sage! Merci pour ce rappel plein d’à-propos.